La porte de l’officine à peine refermée, je regrettai d’être entré. Le vieil apothicaire n’était pas là. Derrière le comptoir, deux jeunes filles particulièrement superbes dans leur blouse blanche semblaient n’attendre que moi. Ces plantureuses préparatrices me fixèrent ensemble, d’un regard bien trop curieux pour le qualifier de professionnel. La grande blonde me faisait penser à Sharon Stone, dans le film « Sliver ». Elle posa son paquet d’ordonnances:
Bonjour, vous désirez monsieur?
– Bonjour, répondis-je en toussotant dans ma main, pourrais-je parler au pharmacien s’il vous plaît ?
– Monsieur Velpo est très occupé…Puis-je vous aider ?
– Je voudrais le voir en privé s’il vous plaît. Je…je suis poly allergique, il connaît mon dossier par cœur.
Mes joues s’enflammèrent
– Bon, je vais voir s’il est disponible. Vous êtes monsieur ?
– Nervi, Patrick Nervi.
La belle blonde décrocha le téléphone en jetant un œil complice à sa collègue.
Aussi canon qu’elle, la brune me lança un regard sous sa frangette du style « J’en ferais bien mon quatre heures ! ». Ses yeux ressemblaient un peu à ceux de « Tokyo », l’héroïne de « La casa de papel ».
Depuis l’adolescence, étant donné mon physique hors-normes, j’avais appris à identifier les filles qui coucheraient avec moi en moins de quarante-huit heures chrono. Ces deux beautés en faisaient partie. Mais dans mon état, il fallait patienter quelques jours pour le vérifier.
Les yeux coquins de la brune replongèrent dans l’ordinateur. Un effluve de thym et de lavande embaumait l’officine. Je respirai l’aromathérapie dans un soupir zen.
Aussi violente qu’inattendue, une nouvelle douleur surgit de mon périnée contus et m’obligea à me courber.
– Quelque chose ne va pas monsieur ? fit la blonde en raccrochant le combiné.
– Non non ! ce n’est rien merci, j’ai dû me froisser un muscle.
– Ne vous inquiétez pas, monsieur Velpo arrive immédiatement.
– C’est gentil, merci bien mademoiselle.
– On appelle plus les filles mademoiselle, dit-elle dans un sourire provocateur, je suis Gaïa.
– Oui…Pardon Gaïa. Vous avez absolument raison, excusez-moi !
– Ma collègue Kléa et moi-même sommes les nouvelles stagiaires du docteur Velpo. Nous avons commencé hier.
Elles échangèrent un regard complice.
Dans un geste de la langue parfaitement synchrone, elles humectèrent leur lèvre supérieure. J’aurais parié qu’elles avaient répété cette chorégraphie buccale depuis leur toute première partie de drague au lycée. Marc Dorcel aurait sûrement utilisé la scène pour la promotion de son prochain film : « Pharmaciennes en régression au stade oral » ou quelque chose dans le genre… Bref, les deux beautés me draguaient méchamment !!
– Ah ? Bienvenue alors dis-je bêtement, c’est la meilleure pharmacie de la ville. Vous risquez de me voir assez souvent, j’ai recommencé le sport après plusieurs années de sédentarité totale.
– Ha ? c’est dommage avec votre physique ! répondit la brune dans un soupir en mesurant ma carrure.
La nature m’avait doté d’une largeur d’épaule hors-normes, style Dwayne Johnson dit « The Rock ». Excellent acteur ceci dit… Elles échangèrent un petit sourire complice. – Justement, nous cherchons un endroit pour nous faire un peu suer. Vous pouvez peut-être nous indiquer l’endroit où vous…
– Bien sûr bien sûr, répondis-je. C’est le gymnase de la zone industrielle, à deux rues d’ici.
– Ah ! je vois dis la blonde athlétique en passant une main lascive façon Dalida dans sa chevelure.
Le galbe de son sein droit dessina une courbe affolante sous la blouse blanche; le mammelon pointait derrière la poche, où deux stylos s’écartèrent sous la poussée mammaire.
On aurait dit un mannequin de pub pour parfum, shampoing ou autre cosmétique bourré d’hormones, à faire bander tout mâle lambda devant sa télé, qu’il fût marié, célibataire, retraité ou veuf.
Je repoussai l’image furtive de son corps de nageuse nue sous la douche, en train de rincer la mousse prisonnière de son magnifique mont de Vénus, blond comme les blés juste avant la moisson.
Je quittai des yeux les bouches pulpeuses de ces étudiantes motivées comme rarement le sont les stagiaires de nos jours. Les flammes dans leurs yeux me redonnèrent du baume au cœur. La jeunesse féminine n’était pas encore perdue. Ces deux spécimens me semblaient prêtes à prendre leur destin en main, embrasser la rude carrière du traitement des douleurs humaines avec panache. Wilhelm Reich, dont j’avais lu l’œuvre complète pour ma thèse, aurait été fier d’elles.